L’Omotenashi: l’art de vous sentir comme un roi au Japon!

par | Nov 7, 2019 | 0 commentaires

Si vous êtes déjà allés au Japon, vous avez sûrement été impressionnés par la qualité d’accueil et de service. Et, si vous n’y avez jamais été, vous en avez sûrement entendu parlé! L’honneur, les valeurs, l’éducation, la politesse, la ponctualité, la modestie, la propreté… Il est de notoriété publique que ce sont des variables qui régissent la société nippone. Très codifié, le Japon, fier de son hospitalité, a su la mettre en avant pour accueillir les Jeux Olympiques d’été de 2020. Cette hospitalité a un nom au Japon (hé oui, là-bas, on a un nom pour tout, cf umami, la 5ème saveur :-)): l’Omotenashi. « Omo quoi? » me direz-vous? OMOTENASHI!

C’est quoi l’omotenashi?

Dans le Larousse, on définit l’hospitalité comme la générosité, bienveillance, cordialité dans la manière d’accueillir et de traiter ses hôtes.
L’omotenashi, va bien au delà de cela. L’excellence reste un impondérable au Japon et l’omotenashi ne consiste pas seulement à bien vous accueillir. Cela passe par la prise en considération de l’autre, de manière désintéressée, sans attente de retour. En outre, il faut savoir établir un environnement de confiance, de détente et de respect sans être trop intrusif. L’autre maître mot, pour en expliquer un des aspects, est l’anticipation: on va devancer vos besoins ou désirs de manière altruiste et agir en conséquence. Oui, c’est tout cela l’omotenashi!

Cela se traduit comment dans le quotidien?

Je viens de m’asseoir au restaurant et l’on m’apporte une serviette pour me rafraîchir (froide car c’était l’été mais elle aurait été chaude en hiver), c’est omotenashi. J’entre dans un grand magasin et l’on me salue « à la japonaise ». On ne me suit pas comme en France (peur du vol? :-)) et le personnel est prévenant et disponible dès que j’en ai besoin. Je vais aux cabines d’essayage, un membre du personnel nettoie le sol de la cabine avant que je ne rentre à l’intérieur (alors que c’était propre): c’est omotenashi. La porte du taxi qui s’ouvre seule et la tenue impeccable des chauffeurs, c’est omotenashi. Les employés de train qui vous saluent à l’entrée et à la sortie du train (voire du wagon), c’est aussi omotenashi. On vous guide dans la rue jusqu’au lieu que vous cherchiez (alors que l’on pourrait juste vous indiquer la route), c’est omotenashi. Bref, je pense que vous avez un peu compris l’idée 🙂 Tout est fait pour que le client ou l’invité vive une expérience réussie (voire exceptionnelle), unique : une succession d’attentions qui ne sont pas forcément grandement visibles mais qui apportent à l’enchantement de l’expérience. En échange, l’invité / client doit apporter respect à son hôte et aux efforts fournis.
L’omotenashi est tellement une garantie de qualité et d’excellence que certaines entreprises (Lexus par exemple) valorisent cette philosophie comme faisant parti de leur ADN. Element de leur marketing, j’ai un peu de mal à voir le côté altruiste du concept 😉.

Quelques exemples d’omotenashi en vidéo

La 1ère vidéo n’est pas vraiment eco friendly 🙂 

Cela vient d’où?

Le célèbre maître du thé du XVIème siècle, Sen no Rikyu (successivement samouraï, moine et maître du thé), a écrit :
« Bien que vous vous essuyiez les mains et enlevez la poussière et la saleté des récipients, à quoi sert tout ce remue-ménage si le cœur est toujours impur? » Traduction: même si vous dirigez la cérémonie avec une habileté sans faille, c’est inutile si vous ne préparez pas le thé avec votre cœur.
Ces paroles reflètent ce que Sen no Rikyu commença à installer à travers les cérémonies du thé, à savoir non seulement une qualité de service irréprochable mais également une prévenance sincère et désintéressée: de là vient l’omotenashi. Au delà d’un concept, il s’agit d’une philosophie de vie qui ne se traduit pas uniquement dans les relations de service « commerciales » ou administratives mais également dans la vie de tous les jours. Enfin, en théorie :-). Personnellement, en tant que voyageur à budget limité, j’ai perçu l’omotenashi mais certainement moins que si j’avais logé dans un 5* ou mangé dans de grands restaurants 😉.
L’omotenashi résulte d’un apprentissage et, même pour les japonais, il est complexe à apprendre! De tradition ancestrale, les jeunes générations ont plus de mal ou sont moins sensibles à son apprentissage et son application.

L’omotenashi, c’est génial mais…

Effectivement, c’est vraiment super, on a l’impression d’être traité comme un roi mais il y a quelques inconvénients ou limites. Lesquelles, me direz-vous? Parce qu’on a tous envie d’être traités comme dans un 5* au quotidien!
On connaît tous, pour le Japon (encore plus qu’ailleurs!), l’importance de ne pas perdre la face. Alors l’omotenashi, cela fonctionne bien tant que vous ne glissez pas sur ce terrain (de manière bien involontaire, on s’entend). Je vous donne un exemple: je suis allée au guichet de la gare routière pour prendre des informations et billets. L’anglais de mon interlocuteur était très limité mais il a eu à coeur d’apporter les informations que je souhaitais. En tout cas, lorsqu’il s’agissait d’un bus direct sur une destination. Lorsque j’ai voulu l’interroger sur des combinaisons de bus pour atteindre une ville, là, ça c’est corsé! Comme il ne comprenait pas mon besoin et surtout l’anglais, j’ai senti que je le mettais en difficulté. La queue derrière moi s’allongeait mais il y avait 2 autres conseillers-vendeurs. J’ai insisté car j’avais besoin de l’information (le site web n’étant qu’en japonais avec une traduction super approximative de Google, pas trop le choix…). Clairement, son attitude a changé, je le « gonflais » littéralement et je lui faisais perdre la face devant les clients qui attendaient. Je me suis quasi-faite renvoyée du point de vente. Aucun jugement de ma part sur le sujet: nos codes sont justes différents, je n’avais pas perçu, à ce moment-là, les limites. Il faut s’adapter au pays d’accueil 🙂
Le côté extrême de l’omotenashi peut aussi gêner des occidentaux. Dans certains des Ryokans (les auberges traditionnelles japonaises), les membres du personnel/ propriétaires ne font plus le fameux accueil (la queue devant les clients). Suite à une enquête, il est apparu que cela mettait mal à l’aise les invités. En effet, en Occident, nous avons une notion de hiérarchie entre la personne fournissant le service et celle qui le reçoit, ce qui n’est pas le cas au Japon. D’autre part, l’idée d’omotenashi est que l’invité n’a pas à demander le service et que l’hôte ne se sent donc pas comme imposant quelque chose dans sa démarche omotenashi. De ce fait, dans les Ryokans, vous mangez quand vos hôtes vous disent de manger et il n’y a pas de choix pour le menu ou le volume du repas. Avant de vous coucher, un employé vient dans votre chambre et pose votre futon et votre linge de lit. Hors beaucoup de gens préfèrent choisir leur heure de repas et coucher.
Un autre point est que l’interaction avec le client/invité peut sembler impersonnelle, manquer de chaleur et de personnalité. On peut ajouter à cela quelques désagréments pour les « hôtes »: à force d’avoir un sourire figé sur leur visage, certains doivent suivre des exercices de yoga facial… 🙂
Quoi que l’on en pense, le désir de bien accueillir ses invités / touristes, est bien présent au Japon. Ancrée de manière ancestrale, l’hospitalité est une notion importante. Ouvert, finalement, depuis peu de temps à l’extérieur, le pays a à coeur de le montrer au reste du monde. Quelquefois déroutant et surprenant mais surtout enrichissant, partir au Japon est juste une expérience culturelle incroyable ! Alors, quand est-ce que vous partez pour vivre l’omotenashi?
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